Abderrazak MOUSSAID, Médecin Sexologue Psychosomaticien

by La Rédaction

La religion musulmane valorise le plaisir

Comment peut-on qualifier le rapport des Marocains au sexe? Y a t il une particularité bien marocaine?
Entre les percéptes religieux et les règles sociales, l’équation est difficile à résoudre, ce qui rend la relation des Marocains au sexe ambiguë, avec une sexualité débridée où se mêlent normalité et perversion, entre permis et interdits.
L’apprentissage de la masturbation, des préliminaires, des positions sexuelles, des relations bucco-génitales, de l’orgasme, sera fera seul, par une éducation sexuelle « implicite » dans la rue, à l’école, les prostituées ou par la pornographie quand elle est accessible. Pour les nouvelles générations, le grand initiateur du sexe est devenu Internet et la pornographie, qui permet aux jeunes d’assouvir leur curiosité et interrogations multiples et surmonter les craintes et les complexes de géniteurs pour se libérer eux-mêmes des tabous et de la culpabilité. De ce fait, le rapport des Marocains au sexe même s’il est aujourd’hui discret et tabou, évolue rapidement grâce aux nouvelles technologies.

   

Les Marocains sont-ils libres sexuellement ?
Non, les Marocains n’ont jamais été libres sexuellement pour la simple raison que depuis l’indépendance, il y avait une répression politique ; en sachant que toute répression politique commence par une répression sexuelle. A partir du 21ème siècle, le climat sociopolitique s’est relativement amélioré…mais le retour au fondamentalisme religieux, entraine une évolution réactionnaire en limitant la liberté des individus et réprimant tout ce qui se rapporte au sexe.

Comment comprendre cette inclination très prononcée pour le sexe pourtant l’hypocrisie bat son plein à chaque fois qu’on parle de sexe au Maroc?
En fait, ce phénomène d’hypocrisie n’est pas propre au Maroc et aux Marocains.
En général, quand on parle de sexe on ment constamment, en famille, entre amis, etc., ce qui rend les études statistiques sur la sexualité très controversées.
Partant du principe que nous manquons de données fiables, l’économiste Seth Stephens-Davidowitz s’est intéressé récemment aux recherches sur Google à propos du sexe.
Il élabore sa démonstration à partir d’un exemple simple.
D’après le GSS : la principale enquête démographique aux USA, l’équivalent de l’INSEE en France, les hommes déclarent faire l’amour 63 fois/an et utilisent le préservatif ¼, c.à.d. 1,6 milliard de préservatifs utilisés par an. Les femmes par contre déclarent faire l’amour 55 fois/an, et utilisant le préservatif dans 16%. Cela donne environ 1,1 milliard de préservatifs utilisés an.

L’économiste se pose alors la question : Qui dit la vérité, les hommes ou les femmes?Pour invalider ces chiffres l’économiste il utilise une autre donnée et constate que moins de 600 millions de préservatifs seraient vendus chaque année aux USA, c.à.d. deux fois moins pour valider les déclarations des hommes et des femmes concernant leurs rapports protégés. Pour expliquer ce décalage, l’économiste trouve plusieurs explications en s’appuyant sur les données récoltées par Google. Après analyse méticuleuse des données, certaines ont attiré son attention. Il s’agit des parties du corps et des termes associés qui sont les plus recherchés dans Google. C’est ainsi que les termes impliquant « mon pénis » sont faites par les hommes (partout dans le monde). Il s’agit de la partie du corps la plus recherchée loin devant le cœur, les yeux, la tête ou les mains. Parmi les recherches impliquant ce terme la plupart concernent la taille (comment le rendre plus gros, plus grand…), alors que les femmes sont préoccupées par les questions d’hygiène et de santé concernant leur « vagin » (odeur surtout), ensuite les « seins» (implants mammaires) et la taille des « fesses ». La particularité de cette étude est que les personnes impliquées sont face à un écran et ne sont pas obligées de se retenir. Cette lecture montre à quel point la symbolique du sexe est importante chez l’humain et l’hypocrisie est toujours présente.

 “La séduction est une science, un art qui vise à admirer et se faire admirer pour chercher l’amour de l’autre. Mais, les rapports de séduction dans notre société (en dehors de certaines classes sociales), où le taux d’analphabétisme est de 35% et celui de l’illettrisme encore plus important, l’art de la séduction fait défaut. En plus des disparités sociales en matière de richesse, la séduction n’a plus de place, le mariage devient celui de l’intérêt.”

Quel rôle joue la religion dans le rapport des Marocains ?
La religion musulmane, contrairement à la religion judéo-chrétienne, valorise le plaisir, raison pour laquelle la polygamie est autorisée et même conseillée, réduisant la femme à un simple objet sexuel.
Elle est omniprésente dans la relation des Marocains au sexe, comme dans tous les pays musulmans. Les rapports sexuels ne sont conçus que dans le cadre du mariage. Cependant, depuis quelques décennies, l’âge du mariage recule pour des raisons matérielles en premier et cela concerne les deux sexes, ce qui entraine une certaine frustration qui pousse les femmes et les hommes à transgresser l’interdit de l’abstinence et les expose à des peines privatives.

Le sexe est souvent lié à la honte et à la violence, pourquoi de tels dérapages au sein de notre société?
En fait, le sentiment de honte est universel, mais plus important dans les sociétés conservatrices comme la nôtre où le poids de la religion et les normes sociales est prédominant. En occident, le système laïc rend ce sentiment de honte relatif. Mais, jusqu’à nos jours (toujours en occident), l’attentat à la pudeur est un délit et la nudité dans les espaces publics est interdite (sauf dans les espaces privés), encore plus pour les relations sexuelles en public….
Quant aux violences sexuelles (en dehors des paraphilies = perversion : Sadomasochisme…), elles sont une conséquence de la frustration que vivent les adolescents et les adolescentes. L’envahissement de notre espace audiovisuel par les chaines satellitaires pornographiques et internet, entraine une excitation trop importante, qui pousse les personnes à assouvir leur besoin en cherchant un partenaire, souvent une victime vulnérable, en général dans l’entourage le plus proche, qui a recourir à la violence.

Sexe et Islam : Une des causes de divorce: incompatibilité sexuelle?
Le divorce est prohibé par la religion musulmane, mais permet la polygamie. D’après l’étude que j’ai personnellement faite pour mon mémoire de 3ème année de Sexologie en 1992 à Paris XIII, il en ressort que la plupart des hommes marocains se remarient avec une deuxième femme après une période d’adultère. Cette forme de mariage ne passe guère chez «les femmes intellectuelles » et donc favorise le divorce. Par contre, la plupart des hommes polygames ont un niveau intellectuel trop bas (primaire ou néant).
Quant à l’incompatibilité sexuelle, elle est une des causes parmi d’autres. La femme marocaine devient de plus en plus exigeante et réclame sa part au plaisir et n’hésite pas à demander le divorce en cas de frustration. En plus, au temps de la mondialisation, le mariage devient celui de l’intérêt et le divorce la solution quand le but recherché est le profit (matériel).

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