Les arts aux avant-postes

by Abdelhak Najib
   

Le marché de l’art au Maroc, c’est un chiffre d’affaires qui dépasse les 600 millions de dirhams. Pas moins de 2500 clients, avec des musées, quelques dizaines de galeristes, des fondations et des espaces d’expositions parrainés par les banques. Sans parler des maisons de ventes aux enchères comptées sur le bout des doigts. C’est aussi un marché parallèle estimé à plus de 200 millions de dhs… Éclairage.  


   

L’argent est le nerf de la guerre dans les arts marocains. L’équation est à zéro inconnue: sans fonds, pas de création. Qu’on se le prenne pour argent comptant, sans l’apport de plusieurs individualités, de quelques mécènes, une poignée de grands collectionneurs, quelques organismes solides, des institutions bancaires, des galeristes convaincus et les rares maisons de ventes aux enchères, il n’y aurait pas d’art au Maroc, ni d’artistes avec une cote, un marché national et quelques visibilités sur l’international. Aujourd’hui, avec presque 15 000 artistes répértoriés, se partageant le marché marocain, il y a plusieurs générations d’artistes et de créateurs qui travaillent dans de nombreuses expressions artistiques. Dans ce foisonnement d’expositions, on voit de loin en loin, émerger des individualités aux talents certains, au grand bonheur des aficionados.

Réalités du terrain

Ceci pour remettre les données dans leur contexte. Il y a certes un passé avec quelques grandes références de pionniers, des éclaireurs. Puis toute  une génération d’artistes qui ont su installer une vision artistique, avec une cohérence dans la recherche et le rendu. Et depuis une vingtaine d’années, on a un florilège de toutes les expérimentations possibles et imaginables, de quêtes personnelles… Quoi qu’il en soit, à l’heure actuelle, dans cet engouement pour l’art, l’argent dicte les lois du marché. Artistes et galeristes semblent être d’accord pour faire du paysage des Arts plastiques marocains, une valeur marchande sûre. Sans oublier qu’il y a, avec la création du Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain de Rabat, une réelle volonté politique, amorcée par Sa Majesté le Roi, pour donner plus de rayonnement aux arts et aux artistes marocains de tous les bords.

Pour une movida artistique

Historiquement, les arts plastiques ont toujours été à l’avant-garde au Maroc. C’est d’ailleurs, pour des raisons évidentes, l’unique expression artistique à avoir su garder un certain niveau donnant à voir le travail d’artistes forts, sérieux, convaincus, porteurs d’un réel projet. On peut mettre cela sur le compte de la censure qui a sévi durant les années 60 et 70, voire même les années 80 du siècle dernier et qui pour des raisons claires n’a pas pu handicaper la peinture qui lui a échappé du simple fait que l’on peut faire dire à une toile ce que l’on veut contrairement à la littérature, qui a pris un sérieux coup de massue à cette période et contraint tant de monde à s’exiler.

Movida certaine
Aujourd’hui encore, quand on parcourt les annales de la peinture marocaine actuelle, on constate que c’est à coup sûr la seule expression artistique fleurissante, au-delà de tous les autres arts, avec de nouveaux visages, une certaine movida, quelques valeurs sûres, des tendances variées, de la créativité et un certain regard moderniste, résolument tourné vers l’universalité. Ce qui fait dire à l’un des plus grands spécialistes du sujet, Moulim El Aroussi, qui a été commissaire associé de la grande exposition “Le Maroc Contemporain” à l’Institut du Monde arabe, à Paris que “ L’art contemporain marocain donne l’impression, surtout aux observateurs non avertis, d’une irruption. Mais ceux qui ont suivi le mouvement depuis les années 90, savent que beaucoup de choses ont préparé cette effervescence. L’ouverture politique du régime aux débuts de la dernière décennie du 20ème siècle, l’attention particulière, même maladroite, pour la culture (des complexes culturels, des structures, l’ouverture de l’Ecole des beaux arts de Casablanca sur la faculté de Ben M’sik…), tout ceci préparait à un mouvement de jeunes que les aînés ne voyaient pas venir. Aujourd’hui, quand on regarde cette exposition, les artistes viennent du Maroc, la majorité est formée au Maroc, ils sont des étudiants, des artistes modernes. Mais l’ouverture politique, médiatique fait qu’ils se sont engagés dans le débat artistique international à partir de leur espace immédiat.” Même son de cloche pour Jean-Hubert Martin, spécialiste des arts plastiques marocains, qui porte un regard juste sur une nouvelle génération d’artistes qui émergent dans cette movida artistique : « Cette nouvelle génération d’artistes est branchée via internet. Elle sait ce qui se passe dans le reste du monde en temps réel. Elle a du mal à accepter des conventions sociales qui lui paraissent relever d’un autre âge. Elle le fait sentir et elle s’exprime à travers les oeuvres qu’elle crée. Cela dit, elle pratique très rarement la provocation agressive qu’on peut relever dans d’autres pays. La critique inhérente aux oeuvres est le plus souvent fine et humoristique.» Ce qui explique entre autres toutes ces expositions sur le Maroc en France comme celle du Louvre sur le Maroc Médieval ou encore cette vente aux enchères, baptisée Moroccan Spirit, qui a été organisée à Paris par la maison Artcurial, le 25 novembre 2014. Un happening artistique qui a mis en valeur les grands noms des arts plastiques du Maroc. Le total de ventes a atteint 1,6 million d’euros. 64% des lots ont été vendus. La gouache Musique et joie d’Ahmed Louardiri a été adjugée à 73.700 euros. Les Chevaux Galopant de Hassan El Glaoui a été cédé à 26.000 euros et son tableau L’Aouache, adjugé à 52.600 euros.

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