À l’âge de 88 ans, le prince Karim Aga Khan IV s’est éteint ce mardi à Lisbonne, laissant derrière lui un héritage immense et unique. Leader spirituel des 15 millions de musulmans ismaéliens, il a accédé à ce rôle à seulement 20 ans, en succédant à son grand-père, Sir Sultan Muhammad Shah, en 1957. Ce jeune étudiant d’Oxford a alors porté une vision révolutionnaire pour sa communauté et au-delà.
Plutôt que de s’enfermer dans les traditions figées, il a modernisé le rôle d’un chef religieux en combinant spiritualité et philanthropie à grande échelle. Grâce au Réseau Aga Khan de Développement (AKDN), il a investi des milliards de dollars dans des projets destinés à améliorer les conditions de vie dans des régions vulnérables d’Afrique, d’Asie et du Moyen-Orient. L’éducation, la santé, le patrimoine culturel et le développement durable étaient au cœur de ses priorités. Par exemple, ses efforts ont permis la restauration de joyaux architecturaux tels que le jardin Babur en Afghanistan et le parc Al-Azhar au Caire, symboles de sa volonté de préserver l’histoire tout en regardant vers l’avenir.
Avec une fortune personnelle estimée à plusieurs milliards de dollars, souvent qualifiée de l’une des plus importantes parmi les dirigeants héréditaires, l’Aga Khan refusait le luxe pour le luxe. Il voyait sa richesse comme un outil au service de son rôle, déclarant que « le bien-être matériel est une composante nécessaire pour bâtir une société juste ». Ce sens aigu de la responsabilité lui a permis de concilier son statut de figure spirituelle avec celui d’un entrepreneur global et discret.
Sa personnalité était tout aussi singulière : urbain, élégant et résolument tourné vers le monde, il fréquentait les grands cercles internationaux sans jamais renier sa mission première. Toujours réticent à se livrer aux médias, il laissait son travail parler pour lui, rappelant que son objectif ultime était d’améliorer les conditions humaines et de promouvoir la tolérance dans un monde divisé.
Aujourd’hui, son départ marque la fin d’une ère. Mais ses projets, ses idées et son héritage philanthropique resteront ancrés dans l’histoire comme un modèle de leadership éclairé et universel.
