La Tbourida : un sport martial

by La Rédaction


Art martial ancestral du monde arabo-musulman, la Tbourida incarne les valeurs de bravoure, de noblesse et de spiritualité. Menacée par la modernité, l’exode rural et le déclin des vocations équestres, cette tradition unique en son genre vit aujourd’hui un tournant décisif. Pour éviter sa disparition, le Maroc, berceau de cette pratique, doit œuvrer à sa codification, à la création de clubs dédiés et à son rayonnement régional et international, à l’image des grands sports martiaux mondiaux.

La Tbourida est un art martial des pays désertiques avec une rapidité d’action (El kerr ou El ferr) dictée par l’impossibilité de s’embusquer ou de se cacher.
Cet art martial a été développé principalement par le monde arabo-musulman dont le livre saint, le Coran, a été le support essentiel par l’énoncé des bienfaits du cheval. Grâce à cette conjonction, l’Islam a pu s’étendre dans le monde  à une vitesse jamais égalée (en un siècle, de Médine à Poitiers).
A l’origine, avec des arcs et des lances, à partir du XVè siècle, avec des fusils, ce sport, cet art martial, cet art Théo-martial s’est développé dans tous les villages. Il était pratiqué après les ablutions par les chevaliers de chaque village. Ce sport portait toutes les valeurs humaines de noblesse, de bravoure, d’abnégation et de fierté.
Ce sport martial était très simple et ne comportait que cinq ou six mouvements, du fait de la courte durée d’une sorba (15 à 20 secondes).
Les règles de ce sport étaient militaires ; un chef qui dirige un ordre unique de tir, avec l’éloge qui va au meilleur chef qui se rapproche du meilleur  tir unique. Ce sport, par sa nature et sa simplicité peut être aisément codifié ; de même que les fusils, les habits et le harnachement. 
La Tbourida se pratique dans tout le Maghreb, de la Mauritanie à la Libye, mais c’est au Maroc que cette tradition est restée la plus vivace.
Et c’est le Maroc qui peut, demain, en être le sauveur en lui apportant le développement et la pérennité, à l’instar des grands sports martiaux développés en Asie, et en Europe (le sumo, l’escrime, la lutte, le karaté, le kung-fu, etc.…..).
Aujourd’hui, l’évolution de la Tbourida est fortement inquiétante, les populations des cavaliers et des chevaux de Tbourida ont chuté de moitié dans les vingt dernières années, pour les raisons suivantes :
– Un exode rural massif (85% de la population était rurale en 1910, et 45% en 2010). Les jeunes qui s’installent en ville n’ont plus la possibilité de pratiquer ce sport.
– Une agriculture de plus en plus spécialisée en monoculture qui ne laisse pas de place aux loisirs d’entretenir un cheval de Tbourida.
– La cherté de l’entretien d’un cheval dans de bonnes conditions (plus de 3.000,00Dh/mois).
– La nécessaire disponibilité quotidienne de chaque cavalier pour élever, nourrir, entrainer, panser, nettoyer les crottins, approvisionner, soigner etc..…
– La grave détérioration psychologique de ce sport martial des nobles cavaliers qui est devenu celui des pauvres cavaliers qui servent de pâture au tourisme ou des administrations omnipotantes, au gré et aux vœux des commanditaires.
– Le transport des chevaux qui est resté archaïque L’absence de terrain approprié pour la Tbourida, terrain qui, pour éviter tout accident ou traumatisme, doit être intelligemment codifié dans sa longueur, dans les circuits des chevaux, dans la nature du sol, dans l’irrigation éventuelle, dans la sécurité  des spectateurs et dans les logements des chevaux et des cavaliers, etc.……
– La difficulté des citadins à pratiquer ce beau sport. Ne disposant pas de ferme, ils ne peuvent pas posséder de cheval.
– L’attrait des sports équestres modernes qui eux, ont la chance de disposer de structures et de moyens financiers importants, facilitent énormément la tâche à leurs cavaliers 
– Qu’allons-nous perdre si la Tbourida ne résistera pas au 21ème siècle dans l’état actuel des choses ?
Chaque année, la population de cavaliers et de chevaux de Tbourida diminue.
Un cheval de Tbourida doit avoir un service qui lui permette de gagner son avoine, il ne peut rester à la charge d’un individu, mais devenir la charge d’une communauté qui souhaite le maintien de ce noble sport martial, trace profonde des populations arabo- musulmanes.
Que pouvons-nous faire pour sauver de façon pérenne la Tbourida ?
Les efforts faits à l’heure actuelle par la Fédération des sports  équestres et de l’Association du Salon du Cheval présidée par Charif Moulay Abdallah Alaoui, ont mis en évidence l’importance de ce sport  martial, mais ne peuvent pas préparer un développement  définitif au Maroc, en Afrique du Nord, et enfin à l’international. Seul un système d’émulation sportive interrégional peut permettre d’améliorer les conditions futures d’existence des chevaux de Tbourida et de leurs cavaliers.
En inscrivant la Tbourida dans le patrimoine culturel de l’UNESCO, nous devons pérenniser ce sport en lui créant les structures adéquates et en provoquant l’émulation des passionnés marocains.
A l’instar des clubs équestres du saut d’obstacles, il est nécessaire de créer des clubs de Tbourida où les sorbas d’une région, les chevaux, peuvent être logés, et disposer d’un terrain d’entrainement adéquat.
Des compétitions interrégionales viendront stimuler, par des allocations conséquentes tous les cavaliers passionnés, leurs sponsors régionaux se manifesteront certainement pour encourager leurs équipes.
6 à 10 clubs de Tbourida suffiront au début pour enflammer cette compétition régionale.
5 à 8 hectares de terrain permettent la réalisation d’un club (terrain de Tbourida, une cinquantaine de boxes, zone de spectacle, paddock).
Ces clubs vont permettre aux ruraux et aux citadins d’avoir un cheval de Tbourida sans obligatoirement disposer d’une ferme, d’un palefrenier, en ayant un encadrement sanitaire et zootechnique de qualité.
La codification de la Tbourida est la plus aisée possible du fait que ce sport est simple et tous les gestes d’une chevauchée sont exécutés dans un laps de temps de 15 à 20 secondes, et ne représentent que 4 ou 5 gestes. La qualité du tir qui doit être unique, peut être aisément mesurée grâce à un audiomètre, ce qui enlève toute discussion possible sur l’issue d’une chevauchée dans le cadre des compétitions. Cette codification peut être écrite clairement et elle serait appliquée par un arbitrage à définir.
Une tenue vestimentaire, un harnachement, la selle et le fusil peuvent être aisément réglementés.
Ainsi, la codification de ce sport et les clubs réalisés vont permettre de dépasser un championnat national qui agrégera une médiatisation et un sponsoring régional conséquent.
Ce sport martial, ainsi mis en place, va d’abord envahir un pays d’Afrique du Nord dans un délai très court. Par ailleurs, nous restons persuadés qu’il deviendra international à moyen terme, car il intéressera l’Andalousie en Espagne, les pays Asiatiques, Musulmans, la Turquie et autres ; il existera ensuite dans la plupart des pays, car ce sport recèle des valeurs humaines très nobles de chevalerie.
Le Maroc aura offert au patrimoine de l’humanité un sport martial.

   
   

Vous aimerez aussi