CMOOA sort le grand jeu à Casablanca : un automne sous le signe de la mémoire et de l’audace

by La Rédaction

Le rendez-vous est désormais inscrit dans le calendrier des amateurs d’art comme un passage obligé. Ce 12 novembre à Casablanca, la CMOOA (Compagnie Marocaine des Œuvres et Objets d’Art) orchestre sa prestigieuse vente d’automne, promettant une traversée vibrante de la création marocaine et au-delà, entre patrimoine, modernité et fulgurances contemporaines. Une exposition publique, ouverte depuis le 29 octobre, donne déjà le ton de cette édition qui s’annonce remarquable par sa diversité et sa profondeur artistique.

Dès les premières pages du catalogue, le dialogue entre générations saute aux yeux. Les grands maîtres du modernisme marocain sont largement représentés, à commencer par Farid Belkahia, dont plusieurs lithographies historiques et une gouache rare de 1964, Rythmes, témoignent de la puissance formelle et philosophique de son œuvre. À ses côtés, Mohammed Chabâa, Jilali Gharbaoui et Ahmed Yacoubi rappellent combien la scène marocaine des années 60-70 fut foisonnante, visionnaire, et résolument engagée dans une esthétique de rupture.

   

Mais cette vente ne s’enferme pas dans le souvenir. Elle rend également hommage à des figures plus récentes et à des langages visuels nouveaux. Mahi Binebine, dont les œuvres ont récemment intégré les collections du Smithsonian à Washington et du Pérez Art Museum Miami, est ici représenté par deux pièces puissantes mêlant cire et pigments. Plus loin, les pastels d’Étel Adnan captent avec sensibilité les modulations intimes de la couleur, et les œuvres lumineuses de Lalla Essaydi et Youssef Nabil ouvrent une fenêtre sur la photographie contemporaine à résonance internationale.

L’audace se poursuit avec la section dédiée à l’art urbain, menée tambour battant par JonOne. L’artiste américano-dominicain, figure de proue du graffiti abstrait, propose deux œuvres monumentales réalisées cette année au Maroc, où la gestuelle calligraphique rencontre la déflagration chromatique. Son travail marque une inflexion contemporaine forte dans le cadre d’une vente qui entend aussi parler aux jeunes collectionneurs.

Parmi les œuvres marquantes, on retrouve également la tendre gravité de Fatima Hassan El Farouj, la force plastique d’un Abdelkrim Ouazzani avec ses sculptures polychromes hybrides, ou encore l’impertinence lumineuse de Tarik Charrat et ses détournements visuels teintés d’humour et de critique sociale.

Mais au-delà des signatures, c’est l’esprit de cette vente qui séduit : celui d’un musée en mouvement, d’un récit artistique qui refuse la linéarité, et qui revendique au contraire le droit à la complexité, à l’éclectisme, à la porosité entre les formes. La CMOOA, sous la direction de Farid Gha Zaoui, ne se contente pas de faire circuler des œuvres : elle construit des passerelles entre les époques, les styles, les héritages et les ruptures.

La vente du 12 novembre ne sera donc pas seulement une enchère, mais un moment de partage et de reconnaissance, une photographie vivante de l’art marocain et de ses dialogues avec le monde. Une scène à suivre, une mémoire à nourrir, et un marché à soutenir.

   

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