Dans un paysage cinématographique marocain souvent dominé par les mêmes visages et les mêmes recettes, Zaz arrive comme une véritable bouffée d’air frais. Porté par la jeune maison de production Papercut Pictures, le film réalisé par Youssef El Mouddakhir s’affirme comme une comédie moderne, intelligente et ancrée dans son époque. L’histoire de Zaz, un homme sans histoires dont la vie bascule après la mise en ligne d’une vidéo virale, résonne comme une satire douce-amère de notre société du buzz et de la célébrité instantanée.
Ce qui distingue Zaz du reste de la production marocaine actuelle, c’est son audace. Audace de ton, d’écriture et de casting. Le film ose se passer de « tête d’affiche » pour donner leur chance à de nouveaux talents. Abdou Chami, dans le rôle principal, livre une interprétation aussi sincère que désopilante, tandis que Sara Dahani, Abdellatif Chaouqi, Karim Saidi et Sahar El Maataoui composent un quatuor attachant et crédible. Beaucoup d’entre eux signent ici leur premier grand rôle, preuve d’une volonté claire : injecter du sang neuf dans le cinéma national.
Derrière ce projet se trouvent deux producteurs visionnaires, Youssef El Mouddakhir et Younes Jebbari. Si ce film marque leur première coproduction, leur démarche s’appuie sur une expérience solide. Youssef El Mouddakhir, figure respectée du milieu avec plus de trente ans d’expérience dans les arts visuels et la création, signe ici sa première réalisation pour le grand écran. Ce pari, à la fois risqué et audacieux, s’inscrit dans une démarche de transmission : faire émerger une nouvelle génération de comédiens, de scénaristes et de techniciens autour d’un cinéma plus vivant, plus accessible et plus ancré dans la réalité marocaine.
L’originalité de Zaz se retrouve aussi dans sa narration. Plus qu’une simple comédie, le film tisse trois intrigues : une principale centrée sur la célébrité soudaine du héros, une enquête policière décalée et un drame familial poignant. Ces trois fils se rejoignent dans un final inattendu, où le rire et l’émotion se rencontrent dans un même souffle. Cette approche scénaristique, portée par Rachid Safar et Abdou Chami, renouvelle les codes de la comédie marocaine, souvent cantonnée au registre pur du divertissement.
Même la promotion du film casse les habitudes. Papercut Pictures a choisi d’investir les réseaux sociaux avec des formats inédits, mêlant humour, auto-dérision et proximité avec le public. Une stratégie en parfaite cohérence avec le propos du film, qui interroge la puissance — et parfois la folie — du monde numérique.
Zaz n’est donc pas seulement une comédie prometteuse : c’est une déclaration d’amour au cinéma marocain, à son potentiel créatif et à ceux qui osent le réinventer. Modeste par son budget mais ambitieux dans sa vision, le film de Youssef El Mouddakhir prouve qu’un bon scénario et une direction inspirée peuvent suffire à créer la surprise. Sortie nationale prévue le 5 novembre dans toutes les salles de cinéma du Maroc — et, sans doute, un joli buzz à venir.