Dans le royaume des sens de Frédéric Malle

by La Rédaction

Il vient de fêter les 20 ans de ses parfums. Immersion dans le monde de l’éditeur de parfums français : Frédéric Malle. Bienvenu dans La Fabrique de Malle…

Le parfum, définit comme une odeur, délicate, agréable ou parfois nauséabonde, en tous cas, pénétrante, car en s’invitant dans une atmosphère, elle circule, telle une information, rappelant une évocation ou réveillant un souvenir d’un lieu, d’une personne, d’une expérience… Dans la recherche du temps perdu, Proust en fait référence, à plus d’une occasion, rapportant de ses souvenirs d’enfant, des parfums et des odeurs qui l’auront à jamais marquées « C’est ainsi que je restais souvent jusqu’au matin à songer au temps de Combray (…) à tant de jours aussi dont l’image m’avait été récemment rendue par la saveur −ce qu’on aurait appelé à Combray le «parfum −d’une tasse de thé. », rendant hommage aux vertus, pouvoirs et puissances de ces évocations olfactives, que nous chérissons, et dont nous parvenons, grâce à la créativité et à l’ingéniosité de grands parfumeurs de ce monde, « les nez », à en retrouver, des extraits qui se nichent soigneusement, dans des écrins précieux, desquels s’exhale l’objet de notre convoitise : la révélation de notre propre identité olfactive !  

Parmi les grands noms de la grande parfumerie contemporaine, Frédéric Malle, il est l’un des rares virtuoses de la parfumerie de luxe, qui continue à élever le métier, dans le rang de l’art, dans un monde ou le parfum est devenu un produit de grande consommation.

Éditeur de parfums, plutôt que parfumeur ou encore créateur de parfum, il fête cette année, 20 ans de création de « formules épurées et symphoniques comme des compositions wagnériennes ». Ses parfums portent tous un caractère abstrait, lié à sa façon de voir et de vivre la parfumerie, « Le Parfum de Thérèse », « En passant », « Dans tes bras », ou encore « Music for a while », « Portrait of a lady »… « Ce sont des parfums chics et intemporels, intenses et confortables, jamais oppressant, et qui vont devenir les classiques de demain » révèle-t-il dans une entrevue dans les carnets nomades de France Culture. 

Son secret, qui n’en est pas un véritablement, être entouré de grands amis, les meilleurs parfumeurs des temps modernes, Dominique Ropion (le créateur des parfums Poison de Dior), Jean Claude Ellena (Le nez de Hermès)… des grands chevaliers, orfèvres et manipulateurs des fragrances, qui interprètent et détournent la subtilité, des effluves naturelles qui ponctuent le temps, « ces notes qui marquent chaque saison par des tâches de couleurs, et révèlent progressivement des présences, magiques, rassurantes et hypnotiques » nous raconte Colette Fellous, en préface de l’un de ses Carnets Nomades. 

Frédéric Malle donne à ses amis, toute la liberté d’écrire leurs parfums, d’agencer leurs créations, comme un récit, un acte poétique, avec un système olfactif et une construction chronologique et intime, lui, se chargera d’établir l’aura de la création, pour finalement révéler un nom unique : la personnalité du parfum créé.

Au tempérament discret, l’éditeur, s’est toujours senti étranger aux codes de l’industrie de la parfumerie de masse. Il refuse dès ses débuts, l’outrance des médias, et lui préfère, l’esthétique et la pertinence « le plus important pour moi a été la réalisation d’un seul et unique packaging, puis et surtout, les boutiques qui avaient besoin de beaucoup d’énergie pour que, quand nous recevons des visiteurs, ils se concentrent sur la fragrance », ses boutiques, qu’il dessine lui-même, sont d’ailleurs des œuvres d’art, combinant signatures de grands architectes, travail des matériaux nobles, et technologies. Son idée, recevoir ses clients dans une atmosphère esthétique, intimiste et confortable, entre un laboratoire de parfumerie et un cabinet des curiosités. Et pour tester les parfums, il a créé des « colonnes à sentir », dont le dessin a été d’ailleurs breveté, le visiteur se retrouve lové, dans ce que M. Malle appelle « le tableau complet » de la création, son «Sillage intégral ».

L’anniversaire des 20 années des Éditions Malle, a coïncidé avec la pandémie, l’éditeur en a profité pour concocter avec ses amis, de nouvelles formes de parfums, plus intimes, que l’on porte pour soi, et cerise sur le gâteau, il révèle son « Projet Covid », un recueil de ses archives, de sa vie de famille avec un grand F, enfants, parents, amis parfumeurs, laboratoires, création de parfum …  des mémoires, qu’il a souhaité partager avec le grand public, pour rendre évident et tangible, le fruit et l’essence des créations de sa Maison :  « EDITIONS DE PARFUMS FREDERIC MALLE – LES VINGT PREMIERES ANNEES »…

En parfumerie, comme c’est le cas pour toute création artistique, la mise au point d’un nouveau « projet » a besoin de beaucoup de temps, certains parfums peuvent prendre jusqu’à 10 années avant d’être révélés, pour libérer leur pouvoir, une indulgence, parfois intime parfois publique, en tous cas, personnelle !

Pour vous, Mesdames, Messieurs, deux produits qui ont fait l’unanimité de la rédaction :

Carnal Flower – Dominique Ropion 

Une fleur magnétique qui engendre une idée de séduction voire de provocation. Carnal Flower, est un parfum qui restitue « l’aspect frais et végétal de la fleur, et qui en révèlerait progressivement les facettes les plus charnelles » Il s’agit de la tubéreuse, et « Carnal Flower contient de loin la plus haute concentration d’absolue tubéreuse naturelle du marché ». Considérée comme un des grands sommets de la parfumerie, la Tubéreuse a été Domptée par Dominique Ropion, architecte des parfums, et Frédéric Malle, au bout de 18 mois de travail et plus de 690 essais, « Un peu à l’image d’un livre, qui démarre un peu transparent, et qui va évoluer vers le côté de plus en plus vénéneux de la tubéreuse pour finir dans une espèce d’océan lactée qui est arrimée à la peau et qui fait partie de quelqu’un ».

Carnal Flower est une signature magnétique qui rend grâce à la féminité mûre, à la fois puissante et sensuelle. 

Angélique sous la pluie – Jean Claude Ellena 

L’angélique, pendant occidentale du Ginseng Coréen, est cette herbe aux anges qui protège celui ou celle qui la porte, suave et musquée, Olivier de Serres la qualifie de « précieuse plante qui sert à tenir la personne joyeusement ». Jean Claude Ellena, l’aquarelliste de la parfumerie contemporaine, l’a capturé, fragile, sous la pluie, « un peu délavée et floue », il en a dessiné les contours, à coup d’associations, pour créer une vibration « comme une caresse » hivernale à la fraîcheur épicée. 

Angélique sous la pluie, aquarelle de nature impressionniste, est cette amulette, qui portée au coup, protège des maléfices et enchante l’enfant qui est en vous.   

Version Mode by Abderrahmane Khomsi

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