Cobra au MMVI à Rabat : Fin d’un accrochage inédit

by La Rédaction

Offerte au public depuis des mois, la grande exposition « Cobra, le serpent à multiples têtes » s’est clôturée récemment par une journée mémorable. Retour sur un événement culturel qui fera date. par mohamed ameskane

Après le vernissage, le finissage ! C’est par une journée studieuse qu’ont pris fin les expositions « Cobra ; un serpent à multiple têtes » et « Chaïbia/CoBrA : au croisement des libertés ». Un colloque scientifique a réuni une pléiade d’historiens d’art et de chercheurs qui ont planché sur les relations du mouvement Cobra et de ses artistes avec le Maghreb et le continent africain. Inspirations, similitudes et autres traits sont décortiqués. Après la projection d’un film, les participants et invités ont célébré cette journée, au cours d’un convivial finissage, réunissant le gotha des arts, de la culture et de la diplomatie dont les ambassadeurs des Pays Bas, du Danemark et de la Belgique. L’ensemble fut clôturé par une conférence à l’auditorium sur le peintre Alechinsky et un spectacle réunissant théâtre, poésie et images. En tamazight, zajal et arabe classique, des jeunes poètes ont clamé des fragments inspirés des œuvres de
l’exposition.

   

Amstelveen/Rabat : aller-retour !

Depuis sa création, la Fondation Nationale des Musées a signé des conventions de partenariat avec un ensemble d’institutions et musée prestigieux à travers le monde. C’est ce qui nous a permis de voir ainsi depuis une dizaine d’années, des accrochages de renommée internationale et inédits sur le continent. Il suffit de faire le tour du musée pour visualiser les affiches, grandeur nature, qui embellissent les façades dans le cadre de la célébration de ses dix ans. Les César, Giacometti, Picasso, impressionnistes, Cuba, arts de la méditerranée collection d’une grande banque espagnole, Da Silva du Portugal…défilent. 

En 2022, Cobra Museum à Amstelveen avait accueilli « The Other Story » (l’autre histoire : le modernisme marocain), un accrochage donnant à voir les diverses facettes et la vitalité des arts modernes et contemporains marocains. L’exposition fut accompagnée par tout un programme culturel, l’ensemble chapeauté par l’écrivain Abelkader Benali, plume qui s’est fait une place de choix dans la langue et la société néerlandaise. 

Organisée par la Fondation Nationale des Arts, le Musée Mohammed VI d’Art Moderne et Contemporain, le Museum Cobra, avec le soutien de l’ambassade, « Cobra, un serpent à multiple têtes » est une sorte de suite à la manifestation des Pays-Basnoua. Il nous plonge, à coup d’une centaine d’œuvres, dans l’univers, les méandres et les polémiques d’un mouvement éphémère (1948-1951) mais qui a bouleversé, sinon révolutionné les visions dans l’histoire de l’art moderne. A savoir, le mouvement Cobra. Un mouvement d’avant-garde réunissant une pléiade d’artistes, écrivains et poètes aux visions diverses. Encore aujourd’hui, on a du mal à le caser dans une définition précise. Le contexte de la sortie de la deuxième guerre mondiale, de l’apogée des partis communistes et des lendemains qui chantent de la révolution d’octobre, ont nourri et stimulé un débat et une effervescence proclamant la rupture avec ce qui se faisait à l’époque. Des plasticiens en provenance de Copenhague, de Bruxelles et d’Amsterdam, les Corneille, Karel Appel, Dotremont, Alechinsky, Constant revendiquent une nouvelle liberté et spontanéité ô combien antinomique des abstractions géométriques et autre réalisme socialiste. Ils sont venus de divers courants expérimentaux, surréaliste révolutionnaire, néo-expressionisme, situationniste…A travers des revues, ils théorisent leurs démarches, débâtent, se chamaillent ou se bagarrent carrément. Dans l‘ensemble, ils revendiquent un art populaire qui s’inspire de l’instinct, des « primitivismes ». De là, leur intérêt pour les expressions des enfants, des fous, de la bande dessinée et des arts d’ailleurs. Dans la première partie de l’exposition, on a par exemple un Pedersen Carl-Henning qui s’intéresse aux légendes et contes nordiques. 

A l’instar des Picasso, Matisse ou Klee, une partie des artistes étiquetés Cobra se sont intéressés, puisé et inspirés par les arts du continent africain. Plusieurs œuvres présentées, entre autres les masques et les sculptures sur bois s’y référent. (du côté de nos artistes, on pense par exemple à Hamidi, Belkahia et leurs inspirations sub-sahariennes.). Le détour est fait aussi du côté de l’Asie avec l’apport des calligraphies chinoises et japonaise. De là, ces œuvres lisibles/visibles réunissant lettre et image.

Décidément, l’art n’a pas de frontières !

   

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