Incivisme au Maroc : le fléau qui menace la vitrine de 2030

by La Rédaction

À cinq ans du coup d’envoi tant attendu de la Coupe du monde 2030, co-organisée par le Maroc, l’Espagne et le Portugal, un nuage ternit les ambitions du royaume : celui de l’incivisme généralisé. Alors que les grues s’activent pour rénover stades et infrastructures, les comportements quotidiens, eux, semblent ne pas suivre la cadence. Une enquête récente du Centre marocain pour la citoyenneté, rendue publique le 28 mai, dresse un tableau sans fard d’un malaise social profond, où l’urbanité et le respect des règles paraissent de plus en plus relégués au second plan.

Derrière le sourire chaleureux du peuple marocain, dont la réputation d’hospitalité n’est plus à faire, se cache une réalité sociale que certains n’hésitent plus à qualifier de « fléau ». Harcèlement de rue, non-respect des files d’attente, propreté défaillante, mépris du code de la route ou encore arnaques touristiques : les exemples abondent et inquiètent. L’enquête, menée auprès de 1 173 citoyens issus de tout le pays, révèle notamment que 84,8 % des sondés pointent du doigt le manque d’hygiène et de propreté dans l’espace public, et que plus de 69 % considèrent le harcèlement des femmes comme un phénomène courant et préoccupant.

   

Cette dégradation du vivre-ensemble ne date pas d’hier, mais la perspective de la Coupe du monde agit comme un révélateur implacable. Les autorités misent beaucoup sur cet événement pour renforcer l’attractivité du pays, booster son tourisme et asseoir son soft power à l’international. Mais le chantier du civisme, bien plus complexe que celui du béton, semble accusé d’un sérieux retard. D’autant que seuls 1,9 % des citoyens interrogés estiment que des mesures gouvernementales efficaces ont été mises en place pour remédier à la situation.

La préoccupation est d’autant plus aiguë que les attentes sont fortes. En juin et juillet 2030, jusqu’à deux millions de touristes sont attendus dans les villes hôtes marocaines. Les comportements envahissants dans les marchés, les pratiques commerciales agressives ou encore la mendicité d’enfants risquent alors de porter un coup sévère à l’image d’un pays qui se rêve vitrine de l’hospitalité moderne. Le sentiment d’impunité évoqué dans les réponses – en lien notamment avec la clémence perçue des peines pour les délits d’incivilité – n’arrange rien à l’affaire.

Ce diagnostic sans appel appelle à une mobilisation à tous les niveaux : dans les écoles, les familles, les administrations et l’espace public. Car au-delà de la réussite d’un événement sportif, c’est la crédibilité même du projet marocain de modernité sociale et de développement humain qui est en jeu. Le Maroc ne pourra véritablement briller sous les projecteurs mondiaux que s’il parvient à restaurer une culture du respect, fondement de toute société ambitieuse.

   

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